En 2009, alors que je lançais mon activité d’assistante freelance, à Paris, j’arpentais le Salon des micro-entreprises.
Cette année-là, j’assistais à plusieurs conférences assez exceptionnelles, dont l’une de Philippe Korda sur le thème « Savoir négocier et défendre ses marges ».
Alors, certes, ça commence à dater, mais les principes restent toujours valables !
Cette conférence m’avait marquée, et j’ai l’impression qu’elle a changé beaucoup de choses pour moi, dans ma manière de défendre mes prix et de faire respecter mon travail.
Cela va souvent ensemble.
La question des tarifs reste brulante pour beaucoup d’offices manager, assistantes ou secrétaires indépendantes.
Pourquoi est-il si difficile de défendre ses marges ?
Nous savons que la question du prix nous renvoie à notre propre valeur (en réalité, celle de notre travail, mais il y a souvent confusion) 😳
Or, pour des femmes qui manquent souvent de confiance en elles, défendre leurs prix est un exercice difficile.
Beaucoup ne croyant pas elles-mêmes à leur valeur (parfois suite à des expériences professionnelles difficiles), non seulement elles proposent des tarifs peu élevés, mais sont également prêtes à accepter la négociation.
Elles sont confrontées à un dilemme :
- Est-ce que je baisse mes prix au risque de ne pas pouvoir atteindre la rémunération décente de mon travail ?
- Est-ce que je ne baisse pas mes prix au risque de perdre la mission ?
Trouver un accord gagnant-gagnant
Or, on oublie souvent un point important :
à la fin d’une négociation, une fois l’accord trouvé, il faut que chaque partie y trouve son compte pour que la relation puisse être durable.
La mise en place d’une mission avec une assistante est toujours un investissement en temps (pas seulement en argent).
L’objectif est bien de trouver ses marques pour que cette relation dure longtemps.
Que l’affaire soit conclue au détriment du prestataire, et celle-ci ou celui-ci arrêtera la mission dès qu’ille en aura l’occasion.
Que l’affaire soit conclue au détriment de la cliente ou du client, parce qu’ille en a absolument besoin, ille en ressentira alors une frustration qui risque de détériorer votre relation et pourrir vos conditions de travail.
L’idée est bien de trouver un arrangement gagnant-gagnant 😃
Éviter le rapport de force et le jeu de la domination
Pour certaines personnes, la négociation relève plus d’un jeu de domination qu’autre chose > vous faire bien comprendre laquelle des deux parties est la plus forte 😈
Si vous acceptez le jeu, vous entrerez dans une relation basée sur le rapport de force.
de deux choses l’une :
- soit, vous êtes joueuse, et cela vous amuse, OK
- soit vous ne l’êtes pas, et vous ne pourrez pas assumer longtemps de travailler dans ces conditions-là
Je sais que c’est difficile (surtout au début) de refuser des missions, mais pour votre bien, ET la pérennité de votre activité, je pense qu’il n’y a pas à tergiverser.
Si vous avez vraiment des difficultés à trouver des missions, contactez-moi pour que nous en parlions 😊
Les 5 facteurs-clés qui vont jouer dans la négociation
➤ Le besoin. Qui a besoin de l’autre ?
Vous, en tant que freelance, vous avez l’impression d’avoir besoin de trouver des client.es. Vous espérez vraiment obtenir cette mission, car il faut que vous développiez votre activité. OK.
Mais en face, si une client.e fait appel à vos services et est prêt.e à investir du temps et à payer pour ça, c’est bien parce qu’ille en a besoin aussi ! Ce n’est quand même pas pour vous faire plaisir 🙄
Oui, mais c’est vraiment une belle mission pour un.e gros.se client.e, vous avez l’impression que vous êtes trop petite, pas assez expérimentée, pas assez qualifiée, que vous n’avez pas assez de références…
Je vous renvoie vers l’histoire du Lion et le Rat > Malgré sa royauté, le lion ne peut pas tout faire. Le rat, aussi petit soit-il par rapport au lion peut faire beaucoup plus de choses, et notamment le sortir de ce mauvais pas (et cela n’a pas de prix, n’est-ce pas ?).
➤ L’information. Bien comprendre les freins et les motivations
Plus vous connaîtrez la personne, plus il sera facile de négocier et de défendre vos marges, parce que justement vous aurez une idée précise de son besoin et de ses limites (budgétaires notamment).
Mieux vaut souvent commencer par une petite prestation qui répond parfaitement au besoin, avec un budget limité, mais qui permette d’entamer sur de bonnes bases la relation, quitte à la développer ensuite, plutôt que de faire une proposition inacceptable d’un point de vue budgétaire au regard de la situation de votre client.e.
➤ L’urgence. Vous préparer à toutes les éventualités
Le besoin de la personne est-il impératif et urgent ? 👉 Vous aurez les moyens de négocier un bon tarif. Cela se comprend.
Mais là non plus, ne jouez pas vous-même le rapport de force, ou vous ne pourrez jamais transformer ce besoin ponctuel en relation pérenne.
Certain.es client.es arguent de l’urgence de la situation pour ne pas parler des tarifs et éviter de contractualiser la relation.
La ou le prestataire freelance est trop content de remporter cette mission « facile » pour s’en préoccuper.
Mais attention, la négociation au moment du paiement risque d’être compliquée 😕
Si le besoin de la personne est impératif et urgent, alors reportez-vous au paragraphe précédent. Elle ne sera pas vraiment en position de négocier ni de faire traîner la signature du devis… à moins que finalement ça ne soit plus si urgent…
Urgence = Vigilance
➤ Un prix légitime. Et là, je vous renvoie vers mon article sur la question du prix.
Quand vous êtes de bonne foi et que vous avez calculé votre juste prix que vous saurez adapter à chaque situation, et notamment au volume de la mission, il sera plus difficile pour vos clientes de négocier.
Cela reviendrait pour elleux à affirmer qu’illes ne souhaitent pas que vous puissiez vous rémunérer correctement de votre activité.
➤ Le choix. Qui des deux parties choisit ?
Votre contact a-t-ille le choix de la personne avec laquelle ille souhaite travailler ?
Quels sont les critères qui entrent en ligne de compte ? La proximité, la qualification, la maitrise de telle langue ou de tel logiciel…?
Vous-même avez-vous le choix d’accepter ou non la mission ?
Au regard de votre planning : est-il plein ou non ?
De vos impératifs financiers : avez-vous absolument besoin de faire entrer de l’argent ?
Qu’est-ce que vous en pensez ?
Est-ce que vous voyez d’autres éléments qui entrent en ligne de compte ?
Les 5 règles d’or de la négociation
Ces règles que je reprends à Ph.Korda vont souvent à l’opposé de ce qu’on ferait naturellement dans ce genre de circonstances.
Pourtant, vous verrez, elles sont toutes basées sur le bon sens.
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📌 1re règle : Il faut oser commencer par une exigence élevée !
Une négociation se termine toujours par un compromis, il ne faut donc pas commencer par un compromis 😉
Et quand je dis élevé, je pense légitiment élevé, pas disproportionné.
Quand vous annoncez votre (juste) tarif, vous devez déjà avoir réfléchi :
✔ Aux autres éléments susceptibles d’être négociés : délais, conditions de travail, de paiement, spécification de la qualité, du volume…
✔ Au prix à l’heure sous lequel vous ne pourrez de toute façon pas descendre, puisque cela ne vaudrait pas le coup de travailler et/ou vous considéreriez que ce serait un manque de respect…
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📌 2e règle : Face à une demande de concession, il faut défendre son prix.
Bah oui ! Si vous acceptez d’emblée de baisser votre prix, que va penser votre contact ?
✔ Que vous lui avez donné un prix bidon, un peu au hasard, donc finalement il pourrait descendre encore plus, puisqu’il ne s’appuie pas sur des calculs réfléchis.
✔ Que vous lui avez annoncé sciemment un prix trop élevé, que vous espéreriez l’arnaquer…
Bref ! La négociation parait mal partie, et surtout je ne vois pas bien comment construire une relation durable sur cette base 🤔
Surtout, essayer de bien comprendre ce qui bloque.
Finalement, pourquoi la personne demande-t-elle une remise ?
- Parce qu’elle n’a pas le budget
- Parce que faire appel à vos services à ce tarif ne serait pas rentable dans sa situation
- Parce que c’est un principe de négocier, pour jouer
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📌 3e règle : Pas de concession sans contrepartie !
Finalement, quand les client.es vous demandent une remise, illes vous donnent un pouvoir. Profitez-en !
Si je reprends les cas cités plus haut :
✔ Si la personne vous dit qu’elle n’a pas le budget…
Alors, vous pourrez négocier sur le volume de la mission ou le niveau de la qualité…
🏳️ Exemple : La secrétaire du CCE d’une fondation me sollicitait pour la rédaction de leurs comptes-rendus de réunion.
Je lui annonce mon tarif « normal », mais cela ne rentre pas dans leur budget de fonctionnement.
Nous parvenons tout de même à un accord : je baisse mon tarif pour entrer dans le budget, mais je me contente d’une retranscription au kilomètre sans faire l’effort de reconnaître qui parle ou de retravailler ce qui est dit. Elle finalise le compte-rendu elle-même avec l’aide du secrétaire adjoint.
✔ Parce que faire appel à vos services à ce tarif ne serait pas rentable dans sa situation…
Alors, ce n’est peut-être pas la bonne cible pour vous.
🏳️ Exemple : Alors que je recherchais moi-même une assistante, et sans vouloir négocier leurs tarifs, je me suis aperçue que je ne pourrais pas travailler avec certaines.
Parce qu’au regard du coût de la prestation (et malgré sa qualité), mon niveau de marge financière ne me le permettait pas.
Nous pouvons en déduire que je ne fais pas partie des cibles de ces assistantes-freelances positionnées sur une fourchette de prix plus élevé.
✔ Parce que c’est un principe de négocier, pour jouer…
Si vous êtes vous-même joueuse, profitez-en pour négocier autre chose qui vous tient à cœur.
Car finalement en vous demandant quelque chose (de baisser votre tarif), la personne vous donne du pouvoir, peut-être l’occasion pour vous d’obtenir des contreparties intéressantes !
🏳️ Exemple : Il y a des années, j’avais une touche avec une boutique dans laquelle j’étais client.e pour une mission de rédaction web. La personne était très sympa, j’adorais ses produits et la philosophie de la boutique (sur le créneau du commerce équitable).
En revanche, son mari (et associé) était un ancien acheteur dans un grand groupe 🤠
Il n’aurait pas pu accepter mon offre sans négocier.
J’ai accepté de descendre mes tarifs, mais en négociant de pouvoir acheter des produits dans la boutique à prix coutant. Il a accepté. Nous étions tous les deux très heureuz de cet accord…
Si vous avez aussi des exemples de ce type, je suis intéressée.
Partagez-les en commentaire de l’article !
D’une manière générale, vous pouvez demander :
- Un volume plus important
- Une avance
- Le paiement des frais annexes
- Un engagement dans la durée
- Moins de temps consacré à ce contrat
- De diminuer la prestation…
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📌 4e règle : Si vous devez reculer…, que ce soit à petits pas.
L’idée est d’essayer de réduire l’impact de chaque concession.
Vous pouvez négocier le tarif sur la première mission (test), mais vous reviendrez au tarif initial pour les suivantes.
Annoncez vos limites : « Sur ce point là, vraiment, je ne peux rien faire ! ».
Cela ne ferme pas la porte.
Vous pouvez proposer un petit geste en plus, une petite prestation annexe gratuite : « pour cette fois, la mise en page du rapport ne sera pas comptée ».
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📌 5e règle d’or : Validez que ce soit bien un accord qui va durer
Il ne faudrait pas que l’une des deux parties accepte finalement l’accord à contrecœur, ou en ayant l’impression de s’être fait rouler.
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Et vous, quelles sont vos astuces, vos pratiques pour défendre vos tarifs ?
Avez-vous des anecdotes à partager sur cette question ?