Déménager quand on est secrétaire indépendante (témoignages)

Déménager peut s’avérer compliqué quand on est secrétaire indépendante, notamment quand une partie de sa clientèle est sur site et qu’il faut se déplacer pour remplir sa mission. Changer de région suppose par ailleurs un certain nombre de démarches, qu’elles soient administratives ou commerciales afin de trouver une nouvelle clientèle sur place.

Voici les témoignages de quatre télésecrétaires qui ont passé avec plus ou moins de succès cette épreuve.

Charline, assistante juridique indépendante, a déménagé à Bordeaux (33)

Charline travaille majoritairement avec des avocats, des huissiers de justice, ou encore des personnes souhaitant créer leur entreprise. Elle a créé Éponyme & Co et exerce sous le statut d’entreprise individuelle au réel.

C’est en 2009 qu’elle s’est lancée comme assistante indépendante, alors que son mari venait d’être muté dans le Gard (30).

« Mes prestations sont variées et destinées uniquement aux professionnels du droit. Je travaille sur site et à distance. C’est variable en fonction des clients et surtout des mois.
Je fais de la retranscription, des recherches juridiques, du montage de dossier de plaidoirie, des formalités auprès des juridictions, du classement, de la compta/ relance clients…
 »

Son activité a démarré rapidement grâce à la distribution de ses plaquettes dans les cases des avocats, leurs boites à lettres professionnelles au sein des tribunaux.

Deux ans après, avec son conjoint, ils décidaient de déménager pour s’installer à Bordeaux.

« La mentalité des gens de la région nous posait problème et nous avions envie de revenir sur l’Aquitaine. Nous avons également appris ma grossesse et cela a accéléré notre décision. Professionnellement, cela fonctionnait très bien, donc c’était plus un choix de vie. »

Charline a pris soin d’anticiper son déménagement auprès de ses clients, en organisant son travail à distance.

« Mes clients ont compris et ils ont vite perçu que je ne les abandonnais pas. J’ai donc mis en place des outils pour pouvoir gérer à distance autant que possible. »

Aussi, n’a-t-elle pas cessé son activité à l’occasion de son changement de région.

D’un point de vue administratif, pas de complication. Pour elle, les démarches ont été simples à réaliser.

« Il faut envoyer un formulaire (en fonction de l’activité artisan ou profession libérale) à l’organisme référent (Chambre des métiers ou URSSAF), et ils se chargent de tout. Le numéro Siret reste identique. Seuls les deux derniers chiffres de l’établissement sont modifiés. »

Finalement, c’est surtout d’un point de vue personnel, du point de vue de sa grossesse, qu’elle a appréhendé ce déménagement.

« Ma clientèle n’a cessé de croitre sur Bordeaux où exercent 1 500 avocats. Pour moi, c’est une vraie réussite sachant que 3 ans après je conserve mes clients. »

Ses conseils :

« Voir si la consœur peut conserver ses clients à distance et mettre des choses en place en ce sens. Voir la concurrence sur son nouveau lieu d’habitation, mais également les potentiels nouveaux clients. Surtout ne pas rester seule et participer à des actions professionnelles dans son nouveau lieu. »

Patricia, secrétaire indépendante, a déménagé dans le Var (83)

Patricia est secrétaire indépendante sous le statut d’entreprise individuelle. Elle effectue des missions de secrétariat classique, commercial et technique, et propose du conseil en gestion et organisation.

« Je travaille essentiellement à distance. Mais lorsque je trouve parfois des missions sur site, je fais en sorte d’installer une confiance avec le client, telle qu’il accepte ensuite que les prestations puissent être aussi effectuées depuis mon bureau. »

Elle a créé Top Secret’R en 2008 dans le Sud de l’Essonne (91), après que son entreprise au sein de laquelle elle était responsable d’administration des ventes ait déménagé sur Nantes et qu’elle ait refusé de la suivre.

Son activité avait un peu plus de 2 ans quand Patricia a décidé de déménager dans le Sud, un rêve de toujours qu’elle a pu réaliser alors que ses filles, des jumelles, quittaient la maison familiale pour poursuivre leurs études à l’étranger.

« Mon métier et celui de mon compagnon ne nécessitaient pas d’être à un endroit précis, ce qui a facilité notre changement de vie. »

Le déménagement a eu lieu en juillet 2010.

Patricia a prévenu ses clients trois mois avant de partir, afin de leur laisser le temps de s’organiser, notamment s’ils souhaitent retrouver un prestataire dans la région.

« Aucun n’a voulu arrêter notre collaboration. De toute façon, mon déménagement ne changeait rien pour la moitié d’entre eux, car je ne les avais jamais rencontrés. »

Son activité n’a pas été arrêtée, si ce n’est le temps du voyage.

« Il est vrai que mes prestations sont telles que je peux les planifier sur une plage de 2 à 3 jours et que, lorsque j’ai pris du retard, il n’est pas rare que je travaille le soir tardivement ou le matin aux aurores (parfois même la nuit). »

D’un point de vue administratif, Patricia a fait les frais du flou qui existait encore, en 2010, sur le statut de la profession de secrétaire indépendante.

« L’URSSAF du Var ne voulait pas m’enregistrer, car ils estimaient que je devais être inscrite en tant qu’artisan. J’ai réussi à obtenir gain de cause suite à de nombreux échanges téléphoniques et de courriers avec l’URSSAF de L’Essonne et l’URSSAF du Var. Mais, je n’ai pu finalement être immatriculée dans le Var que 6 mois après mon arrivée… »

Paradoxalement, depuis son installation dans le Var, Patricia continue de travailler majoritairement pour des clients franciliens.

« En effet, la publicité effectuée entre 2008 et 2010, plus le bouche-à-oreille, m’ont permis de concrétiser de nouvelles missions dans ma région d’origine.
En ce qui concerne mes missions dans le Var, l’intégration est beaucoup plus lente, car les régions du Sud ne sont pas encore très habituées à sous-traiter leur secrétariat. J’ai bien sûr trouvé des nouvelles missions, mais il faut beaucoup plus de temps pour gagner la confiance des clients, et donc permettre une fidélité dans le temps.
 »

Ses conseils :

« Comme tout changement, il faut anticiper et organiser au mieux la situation en se renseignant au maximum sur toutes les démarches à effectuer (professionnelles et privées) et les obstacles que l’on va rencontrer. Internet est un super allié pour préparer les situations à distance. »

Le mot de la fin :

« La meilleure façon de prédire le futur, c’est de le créer vous-même ! »

Nathalie, secrétaire juridique indépendante, a déménagé en Eure-et-Loir (28)

Nathalie propose des prestations de secrétariat et formalités d’entreprises. Elle travaille aussi bien sur site qu’à distance, mais ses clients préfèrent la faire venir sur site « pour plus de facilité et de confidentialité ».

Elle a créé Alfort Secrétariat sous le statut d’auto-entreprise, en 2009, alors qu’elle était encore salariée au sein d’un cabinet d’avocats.

« À ce moment-là, je n’effectuais que du travail à distance que je faisais en rentrant le soir et les week-ends. »

C’est en 2012, alors que son employeur lui annonçait une baisse d’activité que Nathalie a choisi de continuer son activité de secrétaire indépendante à titre principal.

Installée dans le Val-de-Marne (94), son entreprise a décollé grâce au bouche-à-oreille.

« Mon lancement a été plutôt facile. N’ayant pas besoin de prospecter, ce sont les clients qui me contactaient. À force de communiquer sur internet et de faire des rencontres professionnelles, j’ai acquis une certaine clientèle, surtout dans le juridique. »

Le déménagement de Nathalie a fait suite à des difficultés d’ordre personnelles.

« Mon mari ayant eu un accident de travail, je ne pouvais plus faire face aux factures et au loyer qui était de plus de 1 000 euros par mois. Il fallait diminuer les charges et nous avons décidé de nous éloigner de Paris, mais en gardant un accès aux transports afin de pouvoir nous y rendre facilement. »

Le déménagement a eu lieu en février 2014, à une trentaine de kilomètres de Chartres.

« Afin de ne pas perturber les prestations chez mes clients, je n’ai pas arrêté mon activité. Mon mari amenait nos affaires dès qu’il avait du temps, et nous avons déménagé un week-end. »

À cette époque, l’activité de Nathalie « roulait », avec une clientèle établie composée d’une dizaine de clients, aussi bien pour des travaux de secrétariat que pour des formalités.

« Il a fallu annoncer à mes clients que je déménageais, ce qui est loin d’être évident. »

Comme elle travaillait principalement sur site, elle a dû réorganiser ses journées et son travail auprès de ses clients, notamment en fonction des horaires des trains.

« Le début a été dur pour l’adaptation ; j’ai dû courir afin d’attraper mon train. Mais en réfléchissant, on se dit que puisque l’on court toute la journée en région parisienne, autant que ce soit pour attraper un train et rejoindre une campagne calme. »

Dans l’ensemble, ses clients lui ont été fidèles.

« C’est moi qui ai souhaité diminuer mes prestations sur Paris. Du fait de la fatigue et du coût des transports, je ne pouvais plus tenir. »

Depuis, elle a déjà trouvé deux clients près de chez elle.

D’un point de vue administratif, Nathalie a profité du déménagement pour effectuer son inscription auprès de la Chambre des métiers. Elle ne l’avait pas encore fait, puisque ce n’était pas obligatoire lors de son immatriculation, en 2009.

« J’ai contacté la Chambre des métiers de l’Eure-et-Loir qui m’a indiqué la procédure et m’a transmis les formulaires et la liste des documents par mail. J’ai joint un règlement de 42 euros, j’ai tout rempli et envoyé l’ensemble par courrier, et j’étais inscrite officiellement en Eure-et-Loir. »

Aujourd’hui, elle a retrouvé le niveau d’activité qui était le sien en 2012, avant son déménagement.

« J’ai rencontré des gens formidables qui m’ont aidé à faire ma publicité dans le coin. »

Elle avait pourtant appréhendé ce changement :

« Oui bien sûr que l’on appréhende le déménagement, car quitter la région parisienne où tout parait facile et déménager dans une zone rurale où les mentalités ne sont pas les mêmes, on craint toujours de ne pas avoir de clientèle. Il faut tout reprendre à zéro, la prospection, les rencontres professionnelles, se faire accepter dans le village où on se trouve. Tout cela n’est pas évident du tout. »

Ses conseils :

« Prévoir sa prospection, s’organiser et surtout anticiper les coûts des transports. Avant de déménager, je me suis renseigné sur les consœurs qui pouvaient être à proximité, si elles faisaient de la publicité dans le coin. Il faut tout anticiper et surtout se différencier des autres. »

Nathalie, assistante indépendante, a déménagé dans la Loire (42)

Nathalie est assistante indépendante et propose des prestations de secrétariat et d’assistance aux appels d’offres. Elle travaille essentiellement à distance.

Elle a créé Extern’Office en décembre 2013 dans l’Hérault près de Montpellier. Inscrite sous contrat CAPE au sein d’une coopérative, ce statut lui permet de continuer à percevoir ses allocations chômage.

Ses premiers mois d’activité ont été consacrés à la prospection.

« J’ai finalement décroché mon premier client. En juin, j’ai présenté Extern’Office sur le salon de Connec’Sud sous couvert de la coopérative qui hébergeait mon activité. La prospection commençait à porter ses fruits, avec des perspectives positives en vue de nouveaux clients à venir dont les prestations seraient à distance, mais parfois sur site. Je n’étais pas encore en mesure de me verser un salaire, mais je restais optimiste. »

En avril 2014, son époux saisit une belle opportunité de carrière dans la Loire, et le couple décide de déménager dès septembre près de Roanne.

« Une expérience difficile, du fait d’une perte de temps due à l’organisation du déménagement, une période d’inquiétude due au déplacement de l’activité, mais le pire a été que les fruits de ma prospection passée arrivaient justement là où je ne pouvais plus dire oui, car sur site, sans compter la perte de deux clients. »

Nathalie a quasiment arrêté de travailler de mai à octobre 2014, « le moral en berne ».

Elle avait bien sûr prévenu ses clients en leur expliquant que ses activités et prestations restaient inchangées.

« Trois n’ont pas été gênés, puisqu’uniquement à distance, deux autres ont été perdus, et trois à venir n’ont pas signé (puisque prestation prévue sur site). »

D’un point de vue administratif, Nathalie a pu retrouver une coopérative sur place, à Roanne, et a donc quitté la coopérative de Montpellier. Elle a choisi de rester sous contrat CAPE, « afin de me créer un réseau, comme je l’avais fait dans le Sud ».

Du point de vue réseau, tout est en effet à recommencer : « ici, il n’y a pas Femmes Actives LR, ACEOS, BNI, etc. »

Aujourd’hui, Nathalie n’a pas retrouvé son niveau d’activité et se pose beaucoup de questions sur son avenir.

« Les choses actuelles sont juste catastrophiques. Ma motivation a été altérée du fait de ce changement de région et de la perte des réseaux dans lesquels je m’étais intégrée. Mon contrat CAPE se termine en janvier 2016, si d’ici-là la situation n’est pas arrangée, je serai dans l’obligation de mettre terme à la création de mon « bébé ». Pour moi, c’est une catastrophe qui s’annonce. »

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