À la question « la retranscription audio est-elle une spécialité économiquement intéressante ? Intellectuellement épanouissante ? Nerveusement supportable ? », Anne-Marie, créatrice d’Abers Secrétariat, répond avec son franc-parler que nous aimons tant sur le forum des secrétaires indépendantes.
Aux trois questions, on pourrait répondre « ça dépend ».
L’intérêt économique :
Honnêtement, je trouve que la retranscription audio est un travail passablement ingrat. C’est très chronophage et nécessite un minimum d’investissement pour être opérationnelle :
- un casque qui tient la route,
- un logiciel de traitement de texte compatible avec tes clients (Word est loin d’être gratuit),
- un logiciel pour lire les fichiers audio (Express Scribe)…
Auxquels on peut rajouter (pour gagner en productivité) :
- une pédale de transcription (j’ai pris un palonnier de jeux vidéo, moins cher et tout aussi efficace),
- un correcteur d’orthographe (Antidote HD, qui ne fera pas tout, mais fera beaucoup),
- un logiciel de reconnaissance vocale (Dragon Naturally Speaking), au cas où mes mains auraient un pépin (oui, je suis une anxieuse).
Outre l’investissement, il faut prévoir en moyenne 6 heures de transcription pour 1 heure d’enregistrement, sans parler des corrections, de la mise en page et des recherches documentaires. Potasser les fonctions avancées de Word aide beaucoup !
Il convient encore de bien étudier ses tarifs…
L’épanouissement intellectuel :
Tout dépend de ce qu’on retranscrit.
Certains enregistrements de comités d’entreprises (CE) ne consistent qu’à pinailler pour des remboursements de frais de déplacement, mais d’autres redonnent confiance en l’humanité (quand les gens se battent pour leurs projets, avec une certaine grandeur d’âme).
Parfois, on doit tellement « soigner » la syntaxe des participants que c’en est épuisant…
Et puis, il y a toutes ces retranscriptions où on se retrouve au cœur de l’actualité économique ou scientifique, et là, ça devient palpitant. Mais, elles sont trop rares.
Ce sont les seules missions qui compensent le fait d’être exploitée. Car, c’est de l’exploitation, ne mâchons pas nos mots…
La démonstration par les chiffres :
21 euros HT l’heure de travail en fourchette haute et jusqu’à 13 euros HT en fourchette basse, la base de calcul étant : 2,10 euros x 60 minutes / 6 heures de retranscription ou 1,30 euro x 60 minutes / 6 heures.
Là-dessus, je rappelle que 6 heures, c’est une moyenne optimiste.
On est parfois plus proche des 8 heures, et on tombe à 15,75 euros en fourchette haute et à 9,75 euros l’heure de travail en fourchette basse.
Il faut encore y soustraire les charges, selon qu’on soit auto-entrepreneur, libéral ou artisan, ou encore en portage.
Nerveusement supportable :
Il faut pouvoir supporter d’être vissée à sa chaise, isolée du monde avec un casque sur les oreilles.
Il faut pouvoir supporter la pression du client : les délais sont surréalistes parfois (avec un week-end au milieu). Personnellement, je ne gère plus ce genre de demandes, sauf cas exceptionnels (tarifs et sujets plaisants).
Cela dépend aussi des sujets traités : il m’est arrivé de franchement rire ou pleurer en entendant certaines réunions.
Lorsqu’ils se mettent tous à parler en même temps, c’est odieux.
Lorsqu’une discussion se déroule en aparté de la réunion, près du micro, c’est encore plus odieux…
Et je passe les portables qui sonnent à côté des micros, les gens qui toussent, éternuent, se raclent la gorge, tournent des pages bruyamment ou mettent en route une machine à café… Un vrai bonheur…
Personnellement, je fais en sorte d’avoir 10 heures de transcription par mois, pas plus. Sinon, c’est la dépression nerveuse assurée. Cela me permet aussi de garder la main.
Dernier point, la retranscription audio (sur les gros fichiers) est fortement concurrencée par les sociétés off-shore.
Petit bonus productivité pour moi : je fais beaucoup de rédaction web et cela me permet d’avoir des connaissances de pointe sur certains sujets (droit du travail, politique territoriale, recherche scientifique). Mais je préserve l’anonymat, l’origine des sources, etc.
La « Rolls » en matière de retranscription, c’est un client régulier qui fournit du volume, avec un fichier son de qualité et des intervenants policés, ou alors du compte rendu médical (ou spécialisé), qui s’apparente plus en fait à de la « dictée » qu’à de la retranscription audio pure et dure.